Call for Papers « Political Polarization in 21st Century Societies: What It Is and Why It Matters »
Appel à communications « La polarisation politique : réalités et enjeux dans les sociétés contemporaines »
Colloque organisé par Luc Benoit à La Guillaume et Anne-Claire Sanz-Gavillon les 20 et 22 octobre 2022 à l’université de Rouen Normandie.
ARGUMENTAIRE
Issu de la physique et des mathématiques, le terme de « polarisation » est, dans l’actualité, utilisé pour décrire la vie politique dans de nombreux pays. En fonction des contextes, le terme peut renvoyer à un processus ou un résultat, décrire un état de fait ou prescrire le retour souhaité au consensus et à la coopération. Il oscille entre un usage courant, synonyme de division, et un usage savant, lié par exemple à l’analyse des dysfonctionnements des institutions, entre un usage politique au sens étroit de la politique partisane professionnelle et politique au sens plus large, dans ses rapports avec la société. Ces flottements sémantiques expliquent sans doute son succès mais requièrent aussi de repérer les glissements d’un sens à l’autre et leurs enjeux en fonction des circonstances et des contextes nationaux.
Aux Etats-Unis, tandis que les médias l’emploient comme synonyme de « division », certains politistes parlent de « polarisation asymétrique » pour analyser les dysfonctionnements des institutions. Dans ce pays, le débat sur la polarisation fait émerger de nombreux questionnements. Les spécialistes se demandent si les citoyens sont plus divisés ou si ce sont les deux grands partis qui sont devenus plus cohérents sur le plan idéologique, si la polarisation affecte de la même manière les partis républicain et démocrate, si elle vient des élites politiques ou des électeurs et s’interrogent sur le rôle que jouent les médias anciens et nouveaux dans son essor.
En Amérique latine, territoire historiquement marqué par la force du présidentialisme et par les inégalités, deux facteurs qui tendent renforcer les oppositions, le recours à la notion de polarisation pour analyser la vie politique n’est pas récent. Alors que le continent est actuellement secoué par d’importantes vagues de protestation ces dernières années, le terme rencontre un succès grandissant dans les médias où il est utilisé régulièrement pour rendre compte de l’exacerbation des tensions et la radicalisation des attitudes, au risque de se transformer en étiquette utilisée pour analyser à la va-vite des situations complexes.
Plus généralement, en Europe, les exemples de polarisation politique ne manquent pas dans la période récente, de l’Espagne où la crise économique a conduit à une profonde remise en question du modèle social et politique mis en place après la dictature à la Grande-Bretagne secouée par le Brexit en passant par la France des gilets jaunes, sans oublier la montée, dans de nombreux pays de mouvements indépendantistes ou qui se veulent « anti-système ».
Une tendance à la polarisation a été également notée concernant des questions politiques ou des aires militantes spécifiques, et la faiblesse du « centre ground » est souvent visible. La distance politique étonnante entre les deux dirigeants qui se sont suivis à la tête du parti travailliste britannique (Jeremy Corbyn et Keir Starmer) en est un exemple, tout comme la division des féministes britanniques actuellement, (concernant les droits de trans), ou celle de la gauche française face aux manifestations récentes mettant en cause la politique sanitaire du gouvernement. De surcroît, des mouvements passant à l’action directe (Extinction Rebellion au Royaume-Uni ou les gilets jaunes en France) ont atteint des niveaux de soutien dans l’opinion publique impensable il y a trente ans.
Ce colloque fournira l’occasion de s’interroger collectivement sur la notion de polarisation et de porter un regard critique sur ses usages et ses liens avec d’autres phénomènes comme la violence politique ou le consensus et avec les structures démocratiques de différentes aires géographiques. La polarisation est-elle problématique en soi ? Constitue-t-elle un prisme de lecture crucial pour saisir et analyser la réalité sociale et politique actuelle ou au contraire cette grille de lecture conduit-elle à une simplification de processus complexes ? Que permet-elle de comprendre et que laisse-t-elle dans l’ombre ? Dans quelle mesure ce terme éclaire-t-il la situation politique actuelle dans les sociétés contemporaines ? Quel espace reste-t-il pour la nuance et les notions de diversité et divergence consubstantielles aux sociétés démocratiques occidentales ?
Pour tenter de répondre à ces questions, on pourra s’intéresser aux réalités de la polarisation ainsi qu’aux usages savants du terme (polarisation asymétrique, affective, sur les réseaux sociaux). Parmi les thèmes possibles figurent la généalogie de ce concept la vie politique et la polarisation partisane, la polarisation politique en lien avec les luttes sociales, les liens entre polarisation politique, médias et réseaux sociaux.
FORMAT DES PROPOSITIONS
Les propositions de communication feront jusqu’à 500 mots et seront accompagnées d’une notice biographique. Les communications, en français ou en anglais, ne dépasseront pas 30 minutes et seront suivies de 10 minutes de discussion. Les propositions seront adressées à lucbenoit@gmail.com et à anne-claire.sanz-gavillon@univ-rouen.fr d’ici le 31 mars 2022.