Poésie moderne et méditations

 

Journée d’études du 21 mars 2017
CEREdI / ERIAC

Contact :

Christophe Lamiot (ERIAC) : christophe.lamiot@univ-rouen.fr
Thierry Roger (CEREdI) : thierry.roger@univ-rouen.fr

Parce que la méditation est une pratique entée sur une tradition dévotionnelle, qu’elle s’associe pleinement ou non à telle tradition, elle concerne directement tout un pan de la poésie moderne où s’accuse un nouveau rapport de l’homme et du sacré. Aux Etats-Unis d’Amérique, les novateurs Whitman et Dickinson ne remettent nullement en cause l’importance du divin, bien au contraire ; ce sont leurs gestes d’écriture qui modifient potentiellement la relation entre ce monde et un autre, spirituel, de l’esprit ou des esprits. De l’autre côté de l’Atlantique, à peu près à la même époque et pour la tradition des lettres françaises, Mallarmé, par delà sa rupture avec l’idéalisme baudelairien, et plus largement chrétien, a une attitude finalement assez similaire : son expérience du « mystère dans les lettres » vise une relève esthétique du « religieux », entendu au sens large.

A partir de ce constat, touchant au fondement de notre modernité, les intervenants de la journée d’études prévue le 21 mars 2017 à la Maison de l’université, à Mont-Saint-Aignan, ainsi que ceux d’une seconde journée d’études sur le même thème, prévue pour 2018, livreront les résultats de divers travaux :

-questionner les différentes coordonnées de la pratique méditative : objets et supports ; espaces et temporalités ; traits génériques et stylistiques, en lien avec les genres anciens de « l’essai », de la « maxime », de la « rêverie », de la « contemplation », du « fragment », par exemple, puisque, depuis la Renaissance, la méditation se constitue comme « genre » de la littérature religieuse, puis se laïcise pour entrer dans le champ de « la poésie », et / ou renouer avec la tradition antique de la méditation philosophique ;

-établir le corpus des œuvres clés de la méditation ou des méditations, auxquelles ont pu se référer (ou non) les poètes, depuis la fin du XIXème siècle jusqu’à nos jours ;

-s’interroger sur le sens, la fonction, les effets, ou encore la valeur de la poésie saisie comme « exercice spirituel », en montrant quelles relations le langage poétique peut entretenir avec les techniques de soi, les techniques du corps et les techniques du sacré, entre recueillement, introspection et spéculation ;

-revenir sur les modes de lecture – modes d’appropriation, modes d’application – de la poésie moderne, dès lors qu’il convient de penser ensemble poème méditant et poème médité, puisque ce qui fut dans l’Occident médiéval une pratique monastique située entre « lectio » et « oratio », entre commentaire, exégèse et mouvement vers la prière pose le problème des liens entre manières de lire et manières de faire, entre le poème et son commencement (poésie comme écoute), le poème et son dehors (poésie comme transitivité) ; mettre en avant, à partir de l’idée de méditation, la fonction cognitive et sociale de la poésie dans la perspective d’une anthropologie de l’attention ;

-faire vivre ou partager en temps réel la pratique méditative de telle ou telle de leurs œuvres (pour les auteurs invités) ;

-affirmer les valeurs de la collection « To » des Presses Universitaires de Rouen et du Havre, quant à ses propositions de mieux-être.

Au vu du contexte historique et dans une perspective extrême contemporaine, pour se tenir au plus près de ce qui anime la poésie en train de se faire, in progress, pour ainsi dire, « Poésie moderne et méditations », comme la journée d’études 2016 « Responsabilités de la poésie », confronte la parole de poètes contemporains, choisis de part et d’autre de l’Atlantique, poètes dont une des caractéristiques principales est d’avoir été traduits (en anglo-américain pour les Français, en français pour les Américains). Il s’agira à nouveau d’offrir une ou plusieurs formulations quant aux principes selon lesquels une poésie avance, nous occupe, fait vivre, offre à réfléchir, à méditer, en l’occurrence, plus simplement suggère, sinon des solutions toutes faites, du moins des chemins ou des cheminements qui nous intéressent tous.

Les laboratoires de recherche CEREdi et ERIAC de l’université de Rouen se rejoignent dans cet effort impulsé par la collection « To » créée il y a peu aux Presses universitaires de Rouen et du Havre (2014). Interdisciplinaire, « Poésie moderne et méditations » se décline en lectures croisées sur le site de Mont-Saint-Aignan, lectures visant tous publics — ouvertes à tous, gratuites. Il est demandé à chaque intervenant de choisir ses textes pour dire au mieux quelles méditations ou pratiques méditatives il associe ou assigne ou reconnaît à la poésie, discours particulier parmi les discours.

Une manifestation sur le même thème avec d’autres intervenants, non moins ambitieuse et prolongement de celle-ci, est dorénavant envisagée pour 2018, où les façons de lier mots et activités humaines se donnent à entendre et soupeser, encore, à nouveaux frais.

Interventions de :
1) Isabelle Alfandary (Université Sorbonne Nouvelle) : « Méditer avec Gertrude Stein »
2) Caroline Andriot-Saillant (CEREdI) : « Méditation et médiation : les voi(e)x du un dans Son blanc du un de Dominique Fourcade »
3) Jean-François Puff (Université de Saint-Etienne) : « Jacques Roubaud et le poème méditatif »

Lectures de :
4) Claude Ber
5) Carla Harryman
6) Joe Ross
7) Lee Ann Brown