Lapidaires Empreintes
Exposition photographique conçue et réalisée
par Claude BESSONE et Jean-Marie WINKLER
avec le soutien de l’ERIAC
Avec son architecture monumentale, le camp de concentration nazi de Mauthausen (Autriche) forteresse de granit unique en son genre, prétendument destinée à glorifier le système répressif national-socialiste, constitue aujourd’hui le lieu privilégié d’une culture du souvenir de toutes les nations qui furent victimes de la Déportation à Mauthausen. Cette culture du souvenir plurinationale, à l’image des monuments nationaux du mémorial de Mauthausen, présentés dans l’exposition photographique « Lapidaires empreintes », est liée aux origines très diverses de la population de ce camp classé en catégorie III (« retour non désiré »), qui compta jusqu’à 27 nationalités différentes de détenus, entre 1938 et 1944. Les divergences des cultures nationales, historiques et politiques apparaissent dans la diversité des représentations mémorielles dont témoignent les monuments nationaux qui se dressent devant le camp de Mauthausen, entre le portail d’entrée et la carrière, sur l’ancien emplacement des baraquements SS réservés aux gardes du camp.
L’ensemble des monuments du mémorial de Mauthausen reflète avant tout les deux connotations principales de la culture du souvenir que sont la victimisation et l’héroïsation. Si les représentations mémorielles de type héroïque sont fréquentes, et le plus souvent exacerbées, pour les monuments des pays de l’Est, c’est la tendance à la victimisation qui prédomine pour les monuments occidentaux. Le culte patriotique demeure présent dans les monuments de toutes origines, tandis que le culte christianisé ne concerne que certaines nations. À l’extérieur du mur d’enceinte, chaque nation a ainsi voulu immortaliser le souvenir de ses victimes – ainsi que l’image qu’elle souhaite donner d’elle-même. Les premiers monuments sont des murs de pierre, érigés avec du granit extrait de la carrière meurtrière. À cette même époque, les pays de l’ancien bloc soviétique répondent avec la mémoire héroïque et la monumentalité du réalisme socialiste. Quelques pays érigent des monuments guerriers, dont la relation avec la Déportation n’apparaît pas. D’autres pays érigent des obélisques, à mi-chemin entre la célébration du souvenir et celle de la victoire. Au fil des années apparaissent des monuments nationaux dédiés à la mémoire civique, tel « J’accuse » ou « Êtres humains, soyez vigilants ». Plus récemment, la mémoire de la Shoah, avec le monument israélien dédié aux victimes juives, ou la mémoire souffrante, minimaliste, des victimes tsiganes.
L’exposition photographique Lapidaires Empreintes a choisi de prendre le contre-pied d’une l’approche documentaire. L’image parle, ou fait parler les pierres. Pour chacun des vingt-six monuments choisis, un montage photographique, avec différentes perspectives, des lumières changeantes, des gros plans ou des panoramiques, donne au spectateur de l’exposition l’impression de pouvoir faire le tour de ces empreintes de pierre ou de métal. L’art lapidaire n’a pas besoin de commentaire : ces statues nous parlent. Elles parlent de ce qu’elles sont censées évoquer, et aussi de ceux qui les ont construites. Mémoires nationales, mémoires héroïques, mémoires souffrantes, mémoires militantes : autant d’images de l’Europe d’après-guerre, à travers ses représentations mémorielles.
Cette exposition a été présentée à la Bibliothèque Universitaire de Paris 12 Val-de-Marne (janvier-février 2009), à la Maison de l’Université de Rouen (novembre 2009) et à l’Université de Fribourg en Brisgau (janvier-février 2010).
Panneaux : Allemagne (RFA), Allemagne (RDA), France, Espagne républicaine, Italie, Pays-Bas, Luxembourg, URSS, Pologne, Hongrie, Albanie, Bulgarie, Tchécoslovaquie, Slovénie, Ukraine, Israël (victimes juives), Tsiganes.
Montages photographiques sous verre, cadre aluminium, format 50×70 et 60×80
Conception et réalisation : Claude BESSONE & Jean-Marie WINKLER
Photographies de Jean-Marie WINKLER
Partenaires : ERIAC, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Comité International de Mauthausen.