La souveraineté corporelle des femmes comme enjeu politique. Régulation de l’IVG et redéfinition du sujet citoyen·ne dans l’Espagne et le Chili post-dictatorial

Date : 12 mars 2019
Horaire : 16h30-18h00
Lieu : UFR LSH | Bât. 3 | Salle du CETAS (A506) | Mont-Saint-Aignan

Anne-Claire Sanz-Gavillon est maître de conférences en études hispanophones au département de LEA de l’Université de Rouen-Normandie (ERIAC)

En Espagne, depuis 2010, toute femme âgée de plus de 18 ans peut demander une interruption volontaire de grossesse (IVG) sans restriction pendant les 14 premières semaines de grossesse. Cependant, cet acquis demeure extrêmement fragile. En 2013, un projet de loi visant à limiter drastiquement le recours à l’IVG fut porté par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy avant d’être abandonné devant les importantes mobilisations organisées dans tout le pays par les organisations féministes. Aujourd’hui, la montée en puissance du parti d’extrême droite Vox et son alliance avec les partis de la droite traditionnelle et modérée laisse craindre de futures attaques contre l’autonomie procréative des femmes espagnoles. De l’autre côté de l’Atlantique, au Chili, la loi de dépénalisation partielle de l’interruption de grossesse a  été déclarée constitutionnelle en 2017, mettant ainsi fin à vingt huit ans d’interdiction totale de l’avortement. Aussi restrictive qu’elle puisse apparaitre la nouvelle législation chilienne constitue un symbole fort en Amérique Latine où le conservatisme gagne du terrain comme l’a récemment prouvé l’élection présidentielle brésilienne.

En retraçant l’histoire de la régulation de l’avortement dans les sociétés espagnole et chilienne et en examinant les arguments, stratégies et répertoires d’action mobilisés par les militant.e.s pro-choix et anti-choix, nous nous proposons d’examiner, dans ces deux démocraties « récupérées », le rapport de l’État au corps des femmes, pensé comme l’espace où s’incarne physiquement la citoyenneté. Ainsi, derrière le combat des femmes pour le droit à disposer de leur corps et les résistances auxquelles elles se heurtent, se pose la question de la (re)définition du sujet citoyen.ne et des normes de genre dans deux États où la discrimination fondée sur le genre a été érigée en norme juridique, sociale et culturelle par une dictature militaire.

Répondante : Sandra Gondouin.