La biographie fictionnelle comme réécriture de l’Histoire collective

Date : Mardi 21 janvier 2014
Horaire : 16h30-18h30
Lieu : Salle du CETAS (A506)

Séance du séminaire « Transferts, hybridation: histoire, discours, fiction » consacrée aux travaux de deux doctorantes de l’ERIAC (cliquez sur le lien pour retrouver le programme du séminaire et toutes les informations).

Rachel Bisson-Fradet (U. Rouen, ERIAC) : « La biographie fictionnelle comme réécriture de l’Histoire collective »

La problématique de notre travail de thèse de doctorat s’articule autour du dialogue entre la création littéraire d’Elena Poniatowska (1932- journaliste, écrivaine et activiste politique mexicaine) et l’expression artistique féminine au Mexique. Le corpus est constitué de trois romans : Querido Diego, te abraza Quiela [Cher Diego, Quiela t’embrasse] (1978), Tinísima (1990) et Leonora (2011).

Leonora s’inspire de la vie de Leonora Carrington, célèbre peintre surréaliste et écrivaine d’origine britannique. Tina Modotti, dont la vie est retracée dans Tinísima est l’élève du photographe américain Edward Weston. Dans Querido Diego, te abraza Quiela Elena Poniatowska dresse le portrait d’Angelina Beloff, artiste d’origine russe dévastée par le départ de son mari, Diego Rivera.

Les trois « romans biographiques » ou « fictions historiques » étudiés mêlent plusieurs genres : épistolaire, biographique et historique. Nous nous intéresserons à cette transgression des genres, à cette hybridité qui caractérise l’écriture d’E. Poniatowska (compilation de lettres réelles et fictives dans Querido Diego, te abraza Quiela ; extraits de journaux d’époque, lettres réelles, photographies, dans Tinísima…).

D’autre part, l’identité des héroïnes fictives des trois romans étudiés possède une base historique puisque toutes les trois font partie de l’Histoire, notamment de l’Histoire artistique du Mexique. Cette utilisation des sources historiques dans la constitution du discours fictionnel nous amènera à analyser cette autre version de l’Histoire, celle vécue par ces trois femmes artistes à travers la diversité et la complexité du contexte historique et géographique : Tina Modotti parcourt l’Italie mussolinienne, l’Allemagne nazie, l’Espagne franquiste, la France Pétainiste, le Mexique postrévolutionnaire et la Russie. Angelina Beloff subit les affres de l’Occupation allemande à Paris. Leonora Carrington rejette les mœurs familiales traditionnelles de l’Angleterre des années 30, elle vit à Paris et côtoie les surréalistes mais fuit la France en guerre pour New York puis s’établit définitivement au Mexique en 1942.

En outre, nous nous intéresserons à la production de « l’effet de réalité », ce que R. Barthes appelle « l’illusion référentielle » et également aux procédés de fictionnalisation de l’Histoire, à l’historiographie officielle incorporée à la diégèse fictionnelle.

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Rachel Bisson-Fradet est doctorante en 2e année sous la direction de Marie-José Hanaï et Francisco Javier Rabassó à l’Université de Rouen, UFR de Lettres et Sciences Humaines.